-Tu penses faire quoi comme style de bouquin, tu as déjà des idées, tu as arrêté quelque chose ?

-Ah bon, il faut arrêter quelque chose pour faire un bouquin ? Ah tiens je savais pas. Si j'arrête de fumer, c'est bien ? Oui mais alors si j'arrête de fumer, faut que je fasse un bouquin de régime, parce que je vais prendre des kilos ça c'est sûr.

-Non je...voulais dire...plutôt un essai ? Tu vois, ce genre de chose.

-Oui tu as raison, si j'arrête de fumer, je dois faire un essai d'abord, parce que tel que je me connais, au bout de deux jours je vais être sur les nerfs à la maison et au moindre regard de travers de ma femme ou de mes enfants, le frigo y va voler, je ne suis pas pour faire voler les frigos en temps normal mais si y faut j'hésiterai pas, faut pas me chercher après deux jours sans cigarette tu vois ?

-Non je veux dire un roman, un conte, de la science fiction, quel genre veux-tu faire ?

-Ah oui un genre...ah oui non d'accord, non c'est que tu t'expliques très mal alors on comprend mal, c'est typiquement une relation de cause à effet, tu expliques trèès mal, on comprend trèès mal, c'est ty-pi-que-ment la notion de causalité dans toute sa splendeur, telle que décrite par les personnes qui ont pour métier de décrire précisément ce genre de notions. Tu me dirais c'est l'effet papillon je te dirais non mais tu chauffes, tu me dirais c'est l'effet domino je te dirais je t'en foutrais moi des dominos mais tu chauffes, tu me dirais c'est l'effet de réaction en chaîne je te dirais et mon pied au cul il fait réaction en chaîne ? mais tu chauffes, tu me dirais c'est l'effet de causalité je te dirais eh ben voilà tu vois quand tu veux, t'es long à comprendre mais je me dois d'user de pédagogie et d'aider mon prochain, et tu es mon prochain, je le sens bien. J'ai cette très nette intuition.

-Un roman, c'est bien un roman, j'en édite pas mal, si c'est bien écrit, bien construit, on peut faire un carton.

-Un roman à l'eau de rose, oui j'y ai pensé.

-Ah bon, tu as une histoire ?

-Non, pas la moindre. Que dalle. Par contre j'ai déjà goûté de l'eau de rose, c'est super-bon et j'aime bien. Bon ça s'appelait « eau de rose » mais c'était en fait de l'alcool de rose, ça venait de Pologne je crois, je te fais pas un dessin, ça faisait arme de destruction massive tu vois, le genre que si maintenant tu passes ça à la douane t'es classé terroriste direct, fiché S+++Premium avec ta photo sur le site du FBI en prime dans la catégorie des « ten most wanted », et c'est Guantanamo qui te pend au nez. Y sont fous ces polonais.

-Ah oui donc tu n'as aucune idée, en quelque sorte.

-Voilààà, c'est exactement ça ! Je suis bien content que tu en prennes conscience.

-Ah oui donc on n'est pas sortis...

-Voilààà, c'est exactement ça ! Je suis bien content que tu en prennes conscience.

-Tu sais que je me pose des questions sur notre collaboration ?

-Alors là, laisse-moi te dire que tu te trompes, je suis carrément le mec le plus au faîte du sujet, j'ai de sacrées idées de livres, crois-moi !

-Ah oui, on peut savoir dans quel genre ?

-Eh bien figure-toi que j'ai déjà recopié la moitié du livre de Patrick d'Arvor sur Hemingway « La vie à l'excès », ça c'est des genres de livres qu'on se passe d'écrivain en écrivain tu vois, ça se fait beaucoup y a pas à s'inquiéter, je vais l'appeler « Trop trop la life » et hop, un succès de librairie assuré.

-Ah oui donc tu veux te lancer dans le plagiat quoi...

-C'est pas du plagiat, alors là mais n'importe quoi hein, c'est un hommage ! Quel plus bel hommage pour un plagiaire que de voir son plagiat plagié, tu peux me dire ?

-On va quand même se retrouver avec un procès avec un truc comme ça, je te le garantis.

-Non, on va pas, TU vas, nuance. Parce que c'est un hommage soit, mais je n'écrirai pas sous mon vrai nom, je suis pas con. Et puis si tu n'as pas les reins solides financièrement ni le courage de le faire, je m'adresserai à quelqu'un d'autre. Il faut du courage et du panache dans ce métier si on veut sortir du lot.

-C'est ça, adresse-toi à quelqu'un d'autre. 

-Qu'est-ce que tu peux être obtus quand même , excuse-moi d'avoir une certaine vision créatrice hein! 

Le sandre au beurre blanc.

Je me demande si ce n'est pas mon poisson préféré.

Bien sûr la truite c'est bon, le saumon aussi, voire un simple filet de merlan fariné et poêlé au beurre avec du persil, mais le pavé de sandre, ça reste incomparable, bien meilleur que le brochet, et par ici c'est le pays du sandre et du brochet, c'est dire si je parle en connaissance de cause . Tu penses bien.

Avec un Sancerre blanc, un Pouilly, un Meursault.

C'est en soi une preuve tangible de l'existence du divin. 

Si le divin existe.

Crois-moi, si le divin existe, y se torche pas au Vieux-Papes mais au Meursault.

Tu crois quoi? Tu prends le divin pour un con?

À suivre...

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Commis par pow wow on jeudi 30 avril 2020


Ce n'est pas le seul à l'évidence, mais j'en connais qui ne sont apparemment nés que pour ça. 

Il faut envisager dès lors que ce puisse être une raison primordiale du pourquoi de la Vie.

Ça fait peur quand même. 

On n'est pas à l'abri. On n'est jamais à l'abri.

Fumer nuit gravement à votre santé et à celle de votre entourage.

C'est marqué en gros sur les paquets qu'on te vend pour fumer.

J'étais donc un gros haricot pataud, ça m'avait frappé car quand j'étais à la crèche avec d'autres haricots, on aurait dit un cassoulet géant, si on était naturellement porté sur une vision toulousaine de la Vie, il y en a même qui étaient déjà tout joufflus et tout bouffis, eux c'était les saucisses du cassoulet, c'est ce qu'on pouvait penser.

Je me suis toujours demandé si ma mère n'avait pas fumé comme un pompier pendant ma grossesse, et que ça m'avait probablement grillé des neurones, des petits neurones pourtant bien doux et bien roses comme une peau de saucisse donc, pourtant c'est marqué sur les paquets, avec des photos horribles, comme celle d'un enfant avec un masque pour respirer. 

C'est une photo horrible. 

Parce qu'elle est toute petite, pas plus d'un centimètre et demi sur trois centimètres et demi, très mauvaise qualité d'impression, les couleurs sont laides, c'est horrible. 

Non, ça donne pas envie de fumer .

Ou alors elle éclusait comme un gardien de phare, ma mère. 

Elle se pochetronnait peut-être le pompon toute la sainte journée, ce qui est également déconseillé aux femmes enceintes qui attendent un enfant, je ne vous apprends rien. 

Ça expliquerait mon retard mental et pourquoi je ne marchais ni ne parlais ni ne lisais à trois mois. 

Elle était bretonne et ça écluse bien les bretons, faut pas se le cacher, ça a un genre de double œsophage le breton, un normal pour s'occuper de la nourriture qui consiste en des crêpes suzette et de l'andouille de Guéméné et du far breton et du quatre-quarts, le tout-venant serais-je tenté de dire, ça y est je l'ai dit, et un autre œsophage itinéraire-bis renforcé et tapissé de téflon pour tout ce qui est substance liquide, y compris et prioritairement les substances corrosives. 

J'exagère pas ou à peine.

Faut savoir que les tuyauteries des centrales nucléaires, comme celle qu'il y a près de chez vous et qui crachote ses rejets radioactifs dans la station de pompage d'eau potable du canton, sont des tuyauteries high-tech calquées en tous points sur le modèle de l' œsophage breton, c'est hyper-résistant à tous les produits dangereux qui s'écoulent dedans. 

Ça résiste à tout. 

C'est dommage que pour relier tout ça on ait fait usage de joints en caoutchouc normal, c'est pour ça que ça fuit de partout dans les centrales nucléaires, la tuyauterie bretonne n'est pas en cause. 

Le nucléaire français est le meilleur au monde. 

Sauf les joints, mais c'est minime le problème des joints. 

C'est du joint de machine à laver, c'est du joint standard, ça se remplace facilement, y pas de souci.

Mais n'ayons pas peur, on ne risque pas un Fukushima en France.

Parce que Fukushima c'est au Japon déjà oui vous faites bien de le souligner, et parce qu'on n'a pas la même culture, les japonais et nous. 

Au pire risquons-nous un Tricastin, un Fessenheim, un Nogent, mais pas un Fukushima ni un Tchernobyl. 

Le nucléaire c'est biodégradable, à long terme mais biodégradable quand même.

Il a sans doute raison mon éditeur, je devrais faire une autobiographie.

J'en ai déjà discuté avec lui, bon c'est pas une flèche finalement, évidemment c'est pour lui que je le fais. 

Pour lui rendre service.

À suivre...

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Commis par pow wow on mercredi 22 avril 2020


Il est chiant cet éditeur, je me demande s'il connaît son boulot.

Tout l'après-midi suivant, j'ai fait le tour de toutes les jardineries du département. 

J'ai eu de la chance, il faisait beau. 

Il aurait plu remarque, c'était pareil, parce que je dispose d'un véhicule de transport autonome motorisé à carburant pétrolifère qui possède la particularité de pouvoir vous transporter d'un endroit à un autre, sans avoir besoin de marcher, et ce dans l'aisance la plus totale, je sais pas si vous connaissez.

Moi j'en ai un.

-Bonjour Mademoiselle, excusez-moi de vous déranger mais il fait beau on a de la chance j'ai un véhicule à carburant pétrolifère, est-ce que vous pourriez m'indiquer où se trouve le rayon du terreau à rempoter ? Dans des sacs.

-Bien sûr Monsieur, suivez-moi...Tenez voilà, vous avez toutes sortes de terreaux différents.

-Excusez-moi, j'ai pas dit s'il vous plaît, je ressors et on la refait.

-Mais non c'est pas la peine Monsieur, et je suis très occupée vous savez.

-Oui mais c'est pour un livre, il faut refaire la scène, faut que ce soit carré pour aérer, déjà la lumière est bonne, le son est bon, on y retourne, bougez pas. dès que je crie "Moteur action" vous bougez comme dans la vraie vie OK? 

-Mais non enfin, j'ai pas que ça à faire ! C'est pour quoi votre terreau au juste ?

-Pour rempoter.

-Ah, du terreau de rempotage, c'est par ici. Et c'est pour rempoter quoi ?

-L'adhésion...j'ai pas compris.

-Pardon ?

-Pour de l'adhésion, c'est ce qu'on m'a dit, alors ça doit exister j'imagine. Auprès du plus grand nombre qu'on m'a dit. C'est quoi le plus grand nombre d'après vous ? Y faut que je rempote auprès du plus grand nombre, vous trouvez pas que c'est un genre d'énigme comme du père Fouras vous ?

-Je ne comprends rien à ce que vous dites, je suis désolée.

-Moi non plus je ne comprends rien, c'est mon éditeur qui m'a dit ça, c'est lui qui veut que je fasse un livre c'est pas de ma faute, moi à la base je suis dessinateur, je sais pas faire des livres, et lui il m 'oblige à en faire un, avec des chapitres en plus, et vas-y que chte donne des ordres, et vas-y qu' y faut faire des chapitres, je sais pas comment lui dire non, à part lui dire non, mais c'est trop simple, c'est la solution de facilité, c'est l'arme des faibles. Je préfère de loin la circonlocution, j'en ai besoin, puis je vais prendre deux pots de géraniums là-bas pendant que j'y suis, merci, sinon.

-Oui je...écoutez, très bien, je vous souhaite une bonne journée alors.

-Vous êtes gonflée vous alors ! Il est déjà seize heures et vous me souhaitez une très bonne journée ! Vous n'êtes pas très commerçante vous alors! 

C'est un monde tous ces commerçants qui vous agressent.

On jurerait qu'on les dérange.

C'est que le monde a bien changé. 

De par rapport aux périodes où il changeait moins. 

Je sais pas, quand j'étais tout petit, vers un ou deux ans j'ai pas compté, je me souviens que je me disais que le monde n'avait pas tellement changé, en un ou deux ans j'ai pas compté. 

J'avais peut-être un repère de temps différent tu me diras.

Oui tu me diras rien je sais, toi tu lis c'est tout. T'as le boulot le plus fastoche. C'est toujours les mêmes.

C'est vrai que je trouvais que le temps ne passait pas vite quand j'étais tout petit, je passais devant une glace, je me voyais tout le temps en couche à quatre pattes, un long filet de bave traînant derrière moi, j'étais désespéré et inquiet car je ne voyais pas de progrès, je me demandais si je n'avais pas un retard et ça m'angoissait. 

Je me disais que je n'allais pas pouvoir passer ma vie en couche à quatre pattes comme ça, je me donnais généralement encore un mois ou deux pour réagir et rebondir, me prendre en main et devenir un homme. 

Et je craignais de décevoir fortement mes parents qui avaient sûrement dû avoir d'autres attentes me concernant, c'était légitime, eux ils avaient fait un enfant pour qu'il fasse des études et ils se retrouvaient avec un gros haricot rose avec une seule dent qui mangeait les miettes sur la moquette et qui bavait.

J'imagine la déception.

Dire que pendant des années, j'ai poussé, mes parents croyaient que j'avais envie de faire caca mais non, je poussais pour essayer de grandir, je ne savais faire que ça à l'époque il faut bien l'avouer, je ne connaissais que cette technique d'expression, mais ça ne marchait pas. 

Par contre je finissais par faire caca quand même.

Ce fut un terrible apprentissage de la vie, un de ces trucs qui te font devenir adulte, à un an et demi, toi t'es encore dans ton monde imaginaire et tout à coup tu prends conscience.

Que la vie ce n'est pas ce que tu imaginais. 

Tu pousses en espérant qu'il en sortira quelque chose de positif, de merveilleux, tu pousses parce que c'est l'instinct qui te le dicte, c'est une loi universelle du haricot rose qui débute dans la vie, tu as l'impression que tu es né pour pousser et que ton avenir sera rose si tu pousses bien comme il faut. 

Et puis non, tu pousses en croyant faire quelque chose de bien et ça donne un truc complètement loufoque qui sent mauvais. 

Ton idéal de vie rêvée et ton génie créateur en prennent un sacré coup, et pour finir tu te rends compte alors que tu n'es qu'un genre de bête machine, un genre de bête moteur à trois temps, dont tu ignores la finalité.

Tu manges tu pousses tu dors.

Tu manges tu pousses tu dors, tu manges tu pousses tu dors.

Tu ne le sais pas encore, mais ça préfigure ta vie future. 

Métro boulot dodo. 

Nous sommes configurés pour avoir une existence mécanique, nous ne sommes que des robots de chair et d'os. 

De la viande rythmée oscillant à telle fréquence, du steak gigotant. 

Quel est le sens de tout ça, sa finalité, son objectif, son intrinsèque but ?

Faire chier ses voisins.

À suivre...

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Commis par pow wow on dimanche 19 avril 2020


J'aurais pas pensé.

Je pense pas à tout.

C'est que c'est le premier que j'écris après tout, c'est ma première autobiographie, il y en aura d'autres sûrement, mais pour la première je me dois de faire un effort particulier. 

Pour les prochains on s'en fout je ferai comme tout le monde, je ferai du copier-coller dans d'autres bouquins ou sur Wikipédia, faut pas bouder la technique, aujourd'hui tu peux faire un bouquin en quelques clics avec le copier-coller, c'est une révolution quand même.

C'est incroyable quand on y pense tout de même, de voir que le progrès a évolué dans ce domaine. 

Je viens d'écrire "le progrès a évolué", tu te rends compte de la pertinence de cette assertion ou pas? 

Tout ce qui concerne la culture a drôlement évolué au fil des années. 

Quand j'étais enfant je me souviens, le mercredi après-midi maman faisait des crêpes, et on sortait le tourne-disques. 

Non, maman ne faisait pas les crêpes sur le tourne-disques, et notez bien par ailleurs que si le Tepaz avait eu un plateau chauffant, c'eût pu alors être possible et hyper-fastoche d'y faire des crêpes. 

On faisait tourner, on versait la quantité adéquate de pâte sur le plateau, on posait la raclette perpendiculairement au centre et ça te faisait ta crêpe tout seul. Je suis un inventeur dans l'âme. Un tourne-crêpes à deux vitesses, 33 tours pour les grosses galettes bretonnes et 45 tours pour les petites crêpes de la Chandeleur. 

33 tours quand t'as le temps et que tu n'es pas pressé, 45 tours pour quand t'es à la bourre entre midi et deux heures.

Mais remplacer la pointe diamantée par autre chose ma paraît impératif, car sinon quand ça tourne, dans le haut-parleur tu n'entends pas un son mélodieux mais un GLBLLRLBLLRBLRGLBR car la pâte à crêpes bourre toute la tête du tourne-disques, pardon, du tourne-crêpes. 

Oui mais donc, le tourne-disques ne nous servait qu'à écouter de la musique. 

Hugues Aufray et son petit âne gris, Tino Rossi et sa belle nuit de Noël. 

Toute l'année on écoutait le belle nuit de Noël, en mangeant des crêpes à la confiture. 

En fait il nous cassait les oreilles Tino Rossi, il nous a fait chier le Tino, et quand il est mort on a poussé un ouf de soulagement. 

C'est d'ailleurs à la même époque, puisque je suis un inventeur dans l'âme, que j'inventai, un mercredi après-midi comme un autre, les bouchons d'oreille anti-Tino Rossi en crêpe à la confiture, pour nous soulager un peu.

Puis vinrent les magnétophones à cassette. 

Avec leurs aléas de lecture de cassette qui parfois te déroulaient entièrement une cassette quand un des deux petits entraîneurs tournants ne tournait plus, ou que l'un tournait plus vite que l'autre ; généralement c'était toujours celui qui dévidait la bande qui tournait plus vite, alors que celui qui enroulait avait du mou dans les genoux grave, et que tu te retrouvais alors avec une cassette et deux kilomètres de bande dehors, toute fripée et toute pliée et bourrée et coincée dans les têtes de lecture, bande que tu tirais pour la décoincer et que tu enroulais pour la énième fois avec un stylo bille, et que ta cassette finissait par être fripée du début à la fin et qu'à écouter ça faisait des modulations tout bizarre et que t'avais l'impression d'écouter de la musique comme si tu avais mangé de la drogue à midi à la cantine, ça préfigurait complètement la musique psychédélique en fait.

Le temps a passé et l'on est aujourd'hui dans l'ère numérique.

Avant il te fallait attendre de longs mois et économiser moults piécettes sonnantes et trébuchantes pour envisager d'acquérir le dernier album de ton artiste préféré, comme Carlos ou Patrick Topaloff. 

Maintenant, on allume l'ordinateur, on clique sur un dispositif spécial qui ressemble à s'y méprendre à un petit rat, et en cinq minutes on a une médiathèque complète.

C'est bien le numérique, mais c'est dur de s'y retrouver.

Aujourd'hui en cinq minutes t'as une médiathèque, qui fait en plus GPS, et quand, sur ton ordinateur, tu te mets à écouter « Le Loir-et-Cher » de Michel Delpech, tu reçois un e-mail de l'office du tourisme du Loir-et-Cher et un SMS de Carrefour qui t'indique qu'il y a des promotions sur les pêches toute la journée.

C'est bien le numérique, mais faut suivre.

Ça va vite quand même.

Tu veux télécharger le tout dernier album de ton artiste préféré qui vient de sortir, et quand t'as fini de le télécharger y a deux nouveaux albums et quatre nouveaux DVD qui sont sortis pendant que tu téléchargeais.

C'est une révolution, et c'est pareil avec les livres, donc.

Comme je le disais au début de ce chapitre.

Que je termine tout de suite pour en commencer vite un autre, puisque mon éditeur m'a bien stipulé qu'il fallait faire des chapitres à mort pour aérer la structure en papier, si je me souviens bien.

Mais je me rends compte à l'instant que je n'ai pas signalé qu'il y avait un nouveau chapitre, et je cherche le meilleur moyen d'attirer l'attention du lecteur à ce sujet.

Du coup je pourrais stipuler que je commence un nouveau chapitre en affichant tout simplement:

                 ATTENTION VOILÀ UN NOUVEAU CHAPITRE .

C'est une piste à suivre.

           ATTENTION VOILÀ UN NOUVEAU CHAPITRE


Mon éditeur m'a appelé, il n'était pas content. Ça s 'entendait au son de sa voix qui n'était pas contente :

-Tu te fiches du monde ! Tu ne vas pas faire un chapitre toutes les deux pages, d'où tu sors ça ?

-Ben c'est toi qui me dit de faire des chapitres pour la structure en papier et puis après quand je fais des chapitres pour la structure en papier tu m'appelles pour m'engueuler que je fais des chapitres , ah ben dis-donc elle est bonne celle-là ! Tu me dis d'aérer, moi j'aère, je disperse, je ventile comme dirait Louis de Funès ! Ah ben t'es marrant toi comme type !

-Oui tu dois faire des chapitres, pour diviser ton livre en des parties bien distinctes. Quand tu fais une phrase, tu utilises la ponctuation pour couper ta phrase en morceaux, pour l'aérer, pour la rendre compréhensible non ?

-Euuuhh...non je...suis comme tout le monde je n'utilise pas systématiquement la ponctuation parce que c'est pas obligé je vois pas d'où ce serait obligatoire de faire des phrases coupées si on a envie de découper les phrases on en fait plusieurs à la suite en tous cas je connais plein de types qui ne ponctuent jamais rien eh ben crois-moi ils ne s'en portent pas plus mal alors hein.

-Tout le monde fait de la ponctuation, même sans s'en rendre compte, alors arrête tes conneries un peu !

-Je fais de la ponctuation si je veux c'est pas toi qui va m'obliger je suis plus un gamin t'as qu'à demander à maman.

-Écoute, c'est pour t'aider que je dis ça, ton livre se doit d'être clair et facilement accessible si tu veux remporter l'adhésion auprès du plus grand nombre.

-Ah bah oui d'accord alors ah oui, dit comme ça alors ah oui.

J'ai raccroché.

J'ai rien compris.

À suivre... 

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Commis par pow wow on jeudi 16 avril 2020


-Tu dois te concentrer sur l'objet de ton récit, n'avoir plus que ça en tête, pour y arriver.

-Oui oui...Je me concentre. Bon là c'est vrai que j'ai un peu l'esprit occupé par mon projet-phare.

-Ton projet-phare?

-Oui, paaarce que c'est mon projeeet!

-Mais ton projet-phare c'est ce récit non?

-Non, ça c'est mon projet-phare de secours.

-Ton projet-phare de secours?

-Oui, je suis un type qui sait rebondir. Je rebondis comme personne. Déjà tout petit au parc, quand les cages à poules étaient occupées par une horde d'enfants, je filais fffwziii au tourniquet.

-Au tourniquet. Fffwziii. 

-Oui, et lorsque le tourniquet était bondé, ma vision d'aigle à 380° ne faisait qu'un tour et je jaugeai en un instant l'état de surpopulation à la balançoire, vers laquelle je fondais tel le rapace avec ses griffes acérées comme le couteau dont la lame brille à l'éclat du soleil. Pareil avec les toboggans. Je rebondissais en un éclair. 

-Mais de quoi tu parles?

-De mon projet-phare.

-Ah oui, et c'est quoi?

-Le mini-frigo individuel pour les oeufs de Pâques.

-Le?

-Mini-frigo. Individuel. Pour les oeufs de Pâques.

-C'est-à-dire?

-Évidemment je suis le seul à l'avoir remarqué. Maintenant à Pâques, il fait beau. Il fait CHAUD. Et les oeufs de Pâques dans le jardin, ça fond vite au soleil. 

-D'où le mini-frigo.

-Oui. Individuel. De la taille d'un gros Rubik's cube. Pour y mettre un lapin à clochette ou une poule et son panier.

-C'est ça ton projet-phare?

-Oui, ça va cartonner.

France5. 

Les dinosaures.

Ça me rappelle qu'un jour, dans le train en partance pour je ne sais plus où, à moins que je fusse en revenance de quelque part à ce moment, disons en tous cas que je prends le train lorsque j'ai envie d'aller à un endroit, et je le reprends tout autant de la même manière pour en revenir, dans le sens inverse, c'est le principe de l'aller et retour, c'est très pratique ; dans ce train donc, je croisai Yves Coppens, le paléoanthropologue-paléontologue célèbre, le codécouvreur de Lucy le petit macaque poilu, le célèbre gars à barbe blanche de la télé qu'on voit dans des émissions sur les fossiles, et disons que j'ai toujours été intéressé par les paléontologues et les co-découvreurs de petits macaques poilus, quels que puissent être leurs noms ou leurs sexes. 

Je suis très macaque poilu comme type.

Je lui fais un signe de la main, il est assis à deux mètres de moi, je lui souris. 

Il me répond gentiment par un signe de la main qu'il a copié sur le mien et il sourit aussi, c'est un sacré copieur le Yves.

Il est bon en fossiles mais en signes de la main il copie le Yves. 

Je lui aurais montré mes fesses, il m'aurait montré ses fesses. 

Je lui aurais montré ma bite, il m'aurait montré la sienne.

J'ai des millions de questions à lui poser tant j'admire son travail, tant il sait vulgariser de manière très intéressante toute l'étendue de son travail et de ses connaissances, il faut bien reconnaître que c'est une sommité dans cette discipline, et je brûle de le bombarder de questions.

Je dois avouer que dans un tel cas, je suis capable de tenir la jambe de n'importe qui des heures durant au risque de l'importuner, tant j'ai soif de connaissances, et dans le train, il vaut mieux avoir soif de connaissances que soif tout court, parce que le quart Vittel tiède c'est vingt-cinq euros. 

Si je m'écoutais, je l'apostropherais aimablement, là tout de suite, pour engager une discussion à brûle-pourpoint ou à bâtons rompus, nan ça c'est juste pour placer deux expressions à la con l'une à la suite de l'autre, vous inquiétez pas, c'est pour faire style que je connais des expressions.

Mais j'ai pas pu engager la conversation car son train partait dans l'autre sens en même temps que le mien.

Parce qu'on était en gare dans deux trains différents arrêtés l'un à côté de l'autre.

Mon éditeur me dit :

-Tu sais, ton livre doit avoir une structure, pour être compréhensible et agréable à lire.

-Oui je sais, la structure sera en papier, c'est agréable le papier, et plus léger que le marbre, le marbre tient mieux dans le temps aussi faut voir ça, j'hésite encore.

-Non je...une structure, je veux dire une construction, le récit doit avoir une structure claire, une construction claire, tu dois aérer ton récit, et n'oublie pas de le découper en chapitres bien distincts pour que ton lecteur ait des repères et ne se noie pas dans un flot continu.et ininterrompu .

-Des chapitres ?

-Oui oui.

-Ah d'accord. Je vais faire plein de chapitres. À la fin, au début, comment ça se passe? 

À suivre...

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Commis par pow wow on lundi 13 avril 2020


Par exemple, le dimanche sur France 5, tu vois un documentaire sur des squelettes de dinosaures. 

Le dimanche c'est journée squelette sur France 5. 

Ou météore. 

On voit un type, un russe souvent, qui se promenait dans la toundra par hasard à un moment donné, peut-être la balade du dimanche dans la toundra après le repas on sait pas, il se balade et son pied bute contre un objet, il ne sait pas ce dont il s'agit, mais il le déterre parce qu'il trouve que déterré ça fait moins enterré d'une part, et par esprit de curiosité sans doute il l'exhume du sol, donc. 

Il s'aperçoit que c'est en fait un os de dix centimètres de long. 

Persuadé d'avoir découvert quelque chose d'extraordinaire, il enfourche son vélo, parce qu'il se baladait en vélo, et revient à toute berzingue au village où l'attend une équipe de spécialistes des os qu'on retrouve en se promenant dans la toundra à vélo. 

Le gars leur fait part de sa découverte tout excité, leur propose de leur montrer l'endroit exact contre une bouteille de vodka, et tous s'équipent et montent dans une petite colonne de véhicules à chenilles dont le moteur chauffait en attendant, en fait on se demande si c'est pas un peu préparé comme documentaire.

Après un petit périple de plusieurs dizaines de milliers de kilomètres, loin de tout, ils arrivent sur le lieu de la trouvaille, mais il est tard alors ils montent un campement de base et prennent un repas en buvant de la vodka et en chantant des chansons russes très tristes avec un accordéon et après ils vont se coucher complètement torchés, c'est des russes c'est pour ça.

Le lendemain matin, le soleil se lève sur la toundra, on distingue enfin le paysage, il n'y a rien sur des centaines de kilomètres à la ronde, c'est la toundra quoi, y a des mousses et du lichen, bon c'est déjà bien, faut bien la remplir la toundra et le lichen c'est pas cher comme revêtement de toundra, c'est moins cher que le lino. 

Je sais j'ai vu le prix du lino chez But.

Là le gars montre aux scientifiques en anorak le lieu où il a trouvé le fossile, mais en moins de trente secondes on s'aperçoit qu'il y a là un squelette de faisan qui s'est fait bouffer la veille ou l'avant-veille par un renard de la toundra, et que le fossile est en fait un pilon de faisan de la toundra, d'où quiproquo. 

Les scientifiques à chapka pittoresque en poil de martre mordorée d'Ekaterinbourg sont dépités et énervés. 

Comme tout le monde a petit-déjeuné à la vodka et qu'ils sont déjà tous pompettes, ils commencent à se foutre sur le trognon, ça dégénère. 

Bon ça se bourre à coups de poings, ça envoie du pâté, mais au moins ça réchauffe.

Jusqu'à ce qu'un des protagonistes tombe au sol et se cogne la tête sur quelque chose de dur. 

Il a une grosse bobiche et on lui soigne à la vodka. 

C'est alors qu'on remarque que ce sur quoi s'est bobiné le gars et qui émerge du sol est bien étrange. 

On entreprend d'y regarder de plus près, on le déterre.

C'est un fémur de dix-huit mètres de long.

Soit c'est un très gros faisan de la toundra, soit c'est autre chose, se disent les scientifiques à bottes en fourrure de loup bigarré de Sverdlovsk. 

En prospectant un peu à l'entour, ils découvrent d'autres vestiges qui émergent, découvrent les restes d'un crâne de quatre mètres d'envergure, quatre mètres, à peu près de là à là, bon j'exagère, de là à là. 

Après un rapide passage en revue de leurs connaissances, on en déduit qu'il ne peut s'agir d'un faisan de la toundra, tout bien considéré, même dopé à mort aux stéroïdes. 

Après j'ai pas suivi, je me suis endormi. 

Y a des docs bizarres sur France 5.

Ce récit palpitant n'est donc pas un ouvrage sur la préhistoire disais-je, et on peut le déplorer, à certains égards. 

Et pas à d'autres, ça dépend des égards qu'on préfère, j'oblige personne à rien, c'est ça qu'est bien avec ce récit, c'est qu'on n'est même pas forcé de le lire, on peut s'en passer d'ailleurs, le monde ne s'arrêtera pas de tourner pour autant rassurez-vous, on peut juste s'en servir pour caler un meuble si on veut, on peut arracher les pages, après les avoir imprimées, et se les fourrer dans le nez si on saigne du nez, les mettre dans le fond de la cage du lapin car, grâce à leur haut pouvoir absorbant et à leur composition spécifique qui neutralise les odeurs, elle sont un allié indispensable à l'hygiène du lapin. 

Le livre ne doit pas seulement être un bel objet, s'il est utile par ailleurs, c'est un plus. 

Mon éditeur, car j'ai trouvé un éditeur compatissant, m'a dit, sans détour:

-Il faut que tu te demandes à quoi va servir ton livre, concrètement, pour le lecteur. C'est un projet global et prenant tu sais, tu dois avoir une vision claire de ton travail avec un objectif tangible, un propos clair et une construction linéaire parfaite.

-Ah zut, j'avais pas pensé à ça. Tu es sûr? Je veux bien te croire après tout, tu n'as pas l'air d'être plus incompétent qu'un autre. Alors concrètement? Un objectif global et prenant? Une vision linéaire parfaite tu dis? Allons bon. Eh bien écoute...mmmm... mon livre, alors je parle concrètement concrètement hein...concrètement donc, mon livre...concrètement parlant...on peut envisager, au pire...qu'il puisse servir...mmmm...à l'hygiène du lapin, imprimé sur du papier buvard, pour rendre service aux gens, c'est plus hygiénique que le foin comme litière.

-Attends attends attends...figure-toi que là tout de suite, je me demande si l'on n'est pas en train de se fourvoyer complètement et si tu es de taille pour ce projet...

-Si je suis de taille? Elle est bonne celle-là! Il me demande si je suis de taille! Un grand gaillard comme moi! Tiens regarde, et debout comme ça, tu en penses quoi? Je suis pas de taille là? Je suis même plus haut que toi, oui mais toi tu triches, tu es assis! »

À suivre...

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Commis par pow wow on dimanche 5 avril 2020
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