Reste
donc que j'ai fait taire mon côté artiste pour faire parler mon
côté écrivain.
C'était moins visuel mais plus intéressant.
Mais
j'ai appris qu'on pouvait être aussi un écrivain incompris, c'est
pas de bol, je croyais que c'était réservé aux artistes, mais non,
on trouve des incompris dans toutes les professions, et il ne faut
pas le cacher, ça touche toutes les couches sociales, et non pas
seulement les couches ou les classes populaires comme on pourrait le
penser, en
faisant abstraction de toute jugeote ou en s'empressant d'émettre un
jugement à l'emporte-pièce, comme ça à la va-vite sur le pouce,
sur des bases sociologiques à chier.
Non.
Je le
dis ici très clairement.
Sans la moindre ambiguïté.
L'incompréhension dans son travail ou dans son milieu n'est pas le
funeste apanage des classes défavorisées, loin s'en faut.
On a tort
d'écouter un certain milieu qui se dit intellectuel et qui essaie de
nous faire croire, à grand renfort de thèses toutes plus fumeuses
les unes que les autres, que les pauvres sont des pédophiles-chômeurs
incompris.
Non.
Mille fois non.
Les pauvres sont des
pédophiles-chômeurs, un point c'est tout.
Il
ne faut pas être grand clerc, comme Julien, pour s'apercevoir que
dans notre société d'aujourd'hui, sous le fallacieux prétexte de
faire une phrase supplémentaire, comme ici, voire deux, pour masquer
l'étendue de la vacuité de son propos, on n'hésite pas à
stigmatiser telle ou telle catégorie de la population.
À seule fin
d'en tirer un bénéfice électoral souvent, et de rallonger un paragraphe au
passage.
Notez que ceux qui font de la rallonge exprès pour étoffer leurs récits avec des phrases courtes et des formules lapidaires sont souvent des gens ignobles.
C'est bas.
C'est tout petit.
C'est pas glorieux.
Pas du tout.
Du tout du tout.
Beurk.
Caca.
Ainsi, l'on stigmatise à l'envi les pauvres, notamment,
parce qu'ils ne sont pas si riches que ça.
Société décadente.
Renversement des valeurs.
Paupérisation de la morale.
Et bim.
La
richesse étant devenue l'unique repère, tant social que moral, on
en oublie qu'il n'en fut pas toujours ainsi.
Du temps des dinosaures
déjà ça c'est sûr, mais aussi longtemps après, la richesse ne
fut pas le critère dominant de la position sociale.
La force brute
suffisait.
Un bon coup de corne de rhinocéros laineux dans la
couenne faisait admettre au rival inférieur que dans la hiérarchie
sociale, il avait la valeur du larbin de service.
La situation a
perduré jusqu'à ce qu'elle ne perdurât plus.
Puis arriva le grand
singe du genre homo.
Dès
son avènement, la richesse et la possession devinrent les critères
essentiels pour marquer sa position sociale, son rang, sa force, et
pour bien marquer aussi son appartenance à la seule race apparue
sur terre qui allait lui en faire baver des ronds de chapeaux, à la
terre.
Ouvrons vite, à ce propos, une rapide parenthèse.
Je n'ai jamais vu quelqu'un faire baver des ronds de chapeaux à quelqu'un, et si l'un d'entre vous possède des
documents à ce sujet, un livre, des photos ou même un petit film
amateur tourné en super 8 montrant explicitement une personne
faisant baver des ronds de chapeaux à quelqu'un d'autre ou à
quelque chose, soyez assez aimable de me contacter, la chose
m'intéresse.
Quoique moyennement en fait.
Même pas du tout, à dire
vrai.
Mon intérêt pour cette expression a duré deux secondes, et
là c'est terminé.
Allez on referme cette parenthèse, tout ça n'a que trop duré.
Dès
l'aube de l'humanité, il a fallu que le plus fort se taille un
gourdin plus gros et plus beau que les autres, admirablement poli
avec les pieds, joliment incrusté de molaires de rivaux, pour
parader, pour impressionner.
Dans les concours de beauté de gourdins
de l'époque, il n'était pas rare, pour paraître plus snob encore,
qu'en plus du défilé proprement dit qui satisfaisait les vanités
les plus exacerbées, qu'on y arrachât allègrement de la mâchoire
à coups du bel instrument pour en démontrer, en plus de ses
qualités esthétiques indéniables, ses capacités à faire péter
du rosbif à trois mètres à la ronde sans grande difficulté; on
joignait ainsi l'utile à l'agréable.
Et l'on alimentait, par ces
démonstrations viriles et bigarrées, les conversations futures qui
ne manqueraient pas de se tenir dans les salons alentour, une fois
tout le monde rentré chez soi.
Mais
j'ignore pourquoi je vous parle de tout cela, ce récit n'est pas un
récit sur la préhistoire.
Non que la préhistoire ne nous intéresse
point, bien au contraire et l'on peut s'en réjouir ou alors pas du
tout si on a la tête près du bonnet, mais là on s'en fout un peu, présentement.
Et puis on ne connait rien de la préhistoire, faut bien l'avouer.
Les quelques spécialistes qui se targuent de bien connaître cette
époque font semblant en fait, ils n'y connaissent que dalle, mais le
manque d'informations concernant cette époque de la vie sur terre
leur permet de dire à peu près n'importe quoi, il n'y aura pas
beaucoup de
monde capable de démentir, c'est un peu scandaleux.
Non faut arrêter
deux minutes les gars.
On est gentils mais y a des limites à qu'on
est des gentils.
À suivre...
C'est bien écrit pour dire.C'est beau comme du Bernanos.
Je vise le Goncourt, en toute modestie.